Les inquiétudes des internes ne sont pas fondées , affirmaient Martine Aubry, ministre de l'emploi, et Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé à la veille du mouvement de grève des gardes lancé lundi soir par les internes des hôpitaux. La mobilisation a pourtant été exceptionnelle selon l'intersyndicale nationale des internes des hôpitaux (Isnih) qui estimait que selon les sites, 50 à 100 % des internes avaient suivi le mot d'ordre de grève dans 21 des 26 centres hospitalo-universitaires (CHU) de l'Hexagone lors de la première nuit de lundi à mardi, avec la bénédiction des autres médecins, praticiens hospitaliers, urgentistes et externes.

Le motif de la grogne : un projet provisoire d'arrêté daté du 11 mars prévoyant que les gardes seraient rémunérées ou payées. C'est le « ou » qui a d'emblée cristallisé le mouvement. « En juin dernier, après deux jours de grève et cinq semaines de négociations, nous avions obtenu un protocole d'accord revalorisant de 20 % le montant des gardes », rappelle Frédéric Penit, président du Syndicat national des jeunes médecins généralistes. De fait, dès l'été, le montant des gardes a été augmenté, passant à 556 F bruts pour les deux premières années d'internat et 704 F pour les trois dernières, pour 14 heures de garde d'affilée de 18 h 30 le soir à 8 h 30 le matin. « C'est moins que le Smic horaire pour des diplômés de niveau bac + 10 », ajoute Nathalie Patte, vice-présidente du Syndicat des internes des hôpitaux de Paris (SIHP). Aujourd'hui, ils ne demandent pas une nouvelle revalorisation, mais simplement la garantie que leurs gardes seront effectivement rémunérées. « On ne peut pas se contenter d'une promesse verbale, on préfère un décret à la bonne foi des ministres », commente-t-elle.

Restructuration hospitalière,

restrictions gouvernementales

Or, une directive européenne imposant un repos de sécurité de onze heures à prendre impérativement dans les 24 heures qui suivent la garde est venue opportunément apporter de l'eau au moulin du gouvernement qui cherche à faire des économies dans un contexte de restructuration hospitalière, estiment les syndicats. « Les gardes, au lieu d'être rémunérées, pourraient être seulement récupérées, cela représenterait une économie de 1,2 milliard de francs par an », explique André Nazac, du SIHP.

Hier soir, l'intersyndicale devait rencontrer le directeur des hôpitaux. Mais celle-ci affirmait qu'elle ne mollirait pas tant qu'elle ne verrait pas le texte du protocole d'accord de juin dernier dûment transformé en arrêté.

Marie VERDIER