Amid Faljaoui

Volkswagen, l’exemple qui montre comment les Américains sont devenus les «profiteurs de la guerre»?

Les amateurs de football savent qu’il y avait une sorte de proverbe qui disait « qu’à la fin, ce sont toujours les Allemands qui gagnent ». Si ce proverbe s’est vérifié pendant des décennies, c’est moins vrai aujourd’hui en matière de football.

Par contre, au niveau économique, on pourrait dire la même chose pour les États-Unis. D’ailleurs mes confrères du Figaro viennent de titrer l’un de leurs articles « Pourquoi les États-Unis sont toujours gagnants dans les crises face à l’Europe ». Mais comme c’est tellement vrai!

Les lecteurs et  lectrices de cette rubrique savent que nous les avions alertés, il y a plusieurs semaines de cela, d’un grave danger : celui de voir nos amis, mais néanmoins concurrents américains attirer sur leur sol des entreprises industrielles européennes. Comment ? Mais tout simplement via un plan de plusieurs centaines de milliards de dollars que vient de mettre en place Joe Biden.

L’objectif officiel de ce plan, c’est de verdir l’économie américaine, mais en réalité c’est un aspirateur à entreprises européennes. Elles sont attirées à venir s’installer sur le sol américain à coups de subsides, de crédits d’impôt et aussi d’un coût de l’énergie 4 à 5 fois moins cher qu’en Europe.

Comment en effet résister à une telle offre ? Difficile ! Tellement difficile que Volkswagen, entreprise bien européenne, et deuxième constructeur automobile européen, vient d’annoncer aux fonctionnaires européens qu’elle allait suspendre son projet d’usine de batteries en Europe de l’Est et donner priorité à une usine similaire aux États-Unis. C’est le Financial Times qui a dévoilé le pot aux roses ce mercredi.

C’est évidemment un coup de bambou sur la tête de notre vieille Europe. Après le covid et l’invasion de l’Ukraine, tous les États européens se sont juré de faire revenir certaines entreprises industrielles en Europe, histoire d’assurer notre souveraineté économique. Et puis, que voit-on aujourd’hui ? C’est que nous n’arrivons même pas à garder sur le sol européen les grandes entreprises qui y sont déjà. Pire encore, comme le faisait remarquer Le Figaro, je cite : « En privé, des hauts fonctionnaires européens estiment que les Américains sont des profiteurs de guerre ». Pourquoi des profiteurs ? D’abord, parce qu’ils nous vendent du gaz naturel liquéfié 4 à 7 fois plus cher qu’aux États-Unis pour remplacer le gaz russe. Ensuite, parce qu’avec leur plan de décarbonation de l’économie américaine, ils ont mis sur la table 430 milliards de subventions, ce qui est leur droit, mais malheureusement ce plan agit comme un attrape-mouche pour les industriels européens. L’Europe risque donc de se faire avoir par les Américains dans cette guerre économique et guerre tout court. Une première fois en achetant trop cher le gaz américain et une deuxième fois en devant laisser filer des fleurons industriels vers les États-Unis.

En fait, ce qu’il faudrait fustiger, ce n’est pas tant le dynamisme américain, mais plutôt la naïveté européenne. Après tout, ce n’est pas la première fois qu’ils nous font ce coup de Jarnac nos amis américains. Souvenez-vous de la faillite de Lehman Brothers en 2008, c’était une crise purement américaine, générée au départ de crédits hypothécaires donnés à des personnes américaines insolvables. Et au final, c’est l’Europe qui a le plus souffert de cette crise financière, pourtant purement américaine au départ.

Et ici, cela commence aussi à sentir le roussi, car si Volkswagen ne reçoit pas des contreparties équivalentes en Europe, c’est clair qu’ils vont installer leur usine de batteries de l’autre côté de l’Atlantique. On s’est beaucoup moqué de l’âge de Joe Biden, de ses maladresses, mais il est en train de faire exactement ce que voulait faire Donald Trump : donner priorité au Made in America. Joe Biden le fait discrètement, sans coup de gueule, mais sous ses dehors d’homme poli et affable, il est en train de détrousser l’Europe avec le sourire.

Une sorte de pickpocket de l’économie mondiale. Bravo l’artiste !

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